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05 Sep

« Téléspectateurs, faites-vous entendre ! »

Publié par secretaire de section

« Téléspectateurs, faites-vous entendre ! »

Audiovisuel public . Le projet de suppression de la pub sur France Télévisions est dans sa dernière ligne droite. L'un des porte-parole de l'intersyndicale, Jean-François Téaldi, répond aux questions du journaliste de l'humanité.

 

 

 
Alors que, lors du Conseil des ministres du 24 septembre prochain, doit être présenté l'avant-projet de loi devant aboutir dès l'an prochain à la suppression de la publicité sur France Télévisions, une semaine après la conférence de rentrée du groupe, l'intersyndicale de l'audiovisuel public rencontre aujourd'hui la ministre de la Culture, Christine Albanel. Jean-François Téaldi, du SNJ-CGT, nous donne son sentiment.

Quelles sont les dernières informations dont vous disposez sur l'avant-projet de loi ?

Jean-François Téaldi. Malheureusement, les seules informations que nous avons eues, nous les avons apprises par la presse ou lors de la conférence de rentrée. La direction a même ignoré nos demandes de rendez-vous tout en sollicitant... Bernard Thibault ! Quant à Albanel, elle nous reçoit alors que tout semble bouclé. Une fois de plus, c'est donc l'omerta la plus totale. Semblent toutefois arrêtées les dispositions suivantes : la transformation de France Télévisions en une entreprise unique, la disparition totale de la pub en 2011, la suppression de celle-ci après 20 heures en janvier pouvant se faire par simple décret. Et, alors que viennent d'être versés les 150 millions d'euros pour compenser les effets de l'annonce début février de la suppression de la pub, devraient être maintenues les taxes prônées par Sarkozy sur la pub des chaînes privées et sur le chiffre d'affaires des opérateurs télécom.

Cela vous inquiète-t-il ?

Jean-François Téaldi. Évidemment. En 2009, il va nous manquer entre 200 et 300 millions d'euros. Et ce sans même savoir si Bruxelles donnera son aval aux taxes de Sarkozy. Nous avons d'ailleurs rendez-vous le 11 septembre avec la commissaire européenne en charge des médias, Viviane Reding, qui, dernièrement, a redit son scepticisme à l'égard de ces taxes, estimant qu'une télé publique doit marcher sur ses deux jambes : la pub et la redevance. Le risque ? Qu'un jour, suite aux recours des chaînes privées et des opérateurs télécoms, France Télévisions doive tout rembourser.

Quid du cahier des charges ?

Jean-François Téaldi. D'après Patrice Duhamel, le bras droit du président de France Télévisions, Patrick de Carolis, les missions des différentes entités de France Télévisions seront maintenues. Reste à savoir comment. Par exemple, si l'identité régionale de France 3 ne semble pas menacée, sera-t-elle toujours une chaîne nationale avec une rédaction ad hoc ? Même incertitude sur le sport. Et quid du Net : alors que France Télévisions a multiplié cet été les sites Internet, quelles seront nos marges de manoeuvre, en matière de pub et de services payants, en sachant - comme on l'a vu en Allemagne - les réticences de l'Europe et des chaînes privées à ce sujet ?

Que penser de la transformation de France Télévisions en entreprise unique ?

Jean-François Téaldi. Carolis a déclaré qu' « il faut faire sauter les verrous juridiques pour construire le groupe ». La tentation semble donc grande pour déclarer caduques les conventions collectives des personnels techniques et des journalistes de l'audiovisuel public. Or, pour transformer France Télévisions en une entreprise unique - et l'Élysée comme le ministère de la Culture sont du même avis -, ce n'est pas nécessaire. Mais, si tel était le cas, ce serait un casus belli qui se traduirait par un conflit sans précédent. D'autant qu'il y a, en outre, une incertitude sur l'avenir des instances représentatives existantes. Or il n'est pas question de revenir sur les acquis du paritarisme.

Le groupe France Télévisions fonctionne-t-il déjà à l'économie ?

Jean-François Téaldi. Du fait de la simple annonce de Sarkozy, nos recettes publicitaires ont d'ores et déjà baissé. D'où un allongement de la grille d'été, des restrictions de moyens pour l'info en région et le gel, d'après nombre de producteurs, de plusieurs projets, malgré ce qu'a pu en dire Carolis. C'est en janvier qu'on verra concrètement les conséquences de cette réforme. Parce qu'il n'y aura plus de pub après 20 heures mais aussi parce qu'il faudra financer les program-mes de remplacement. Carolis a beau avoir redit qu'il démissionnerait s'il n'a pas de moyens, au bout d'un moment, pour un groupe comme le nôtre, le volontarisme ne suffira pas. D'autant que le patron des finances, Damien Cuier, a bien dit qu'il sera impossible de trouver chaque année les 140 millions d'euros de synergies préconisées par la commission Copé. L'équation est simple : avec entre 200 et 300 millions d'euros en moins dans les caisses, il faudra toucher soit à la masse salariale soit aux programmes. Et ça m'étonnerait qu'on touche aux programmes. In fine, il y a à la fois volonté d'affaiblir le service public de l'audiovisuel - au profit des chaînes privées - mais aussi de le reprendre en main. D'abord parce que les PDG seront désormais nommés en Conseil des ministres. Mais aussi parce que les taxes devant financer France Télévisions seront des taxes non affectées. Qui nous dit qu'on ne subira pas, si l'on n'est pas assez « docile », des mesures de rétorsion ? Juppé nous avait ainsi fait « payer » notre couverture de 1995...

Qu'allez-vous dire à Christine Albanel et à Viviane

Reding ?

Jean-François Téaldi. Auprès de la ministre de la Culture, nous espérons en savoir plus sur le projet de loi et sur le futur cahier des charges. Quant à la commissaire européenne, nous comptons l'interroger sur les taxes pour compenser la suppression de la pub ainsi que sur les possibilités pour les chaînes publiques de faire de la pub sur les nouveaux supports. Au-delà, nous allons continuer à interpeller les parlementaires mais aussi les citoyens. Car, si les salariés de l'audiovisuel public seront présents à chacune des étapes de cette réforme, aux côtés de tous ceux qui veulent le défendre, il faut désormais que les téléspectateurs se fassent entendre. Pour dire qu'ils veulent le maintien d'un service public audiovisuel fort, comme ils veulent le maintien d'un service public de la santé, de l'éducation... Si la bataille idéologique est en passe d'être gagnée, car les gens ne sont pas dupes de ce qui se passe, il faut maintenant que la mobilisation soit à la hauteur.

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