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21 Aug

La grève générale contre Morales marquée d’incidents violents

Publié par secretaire de section

La grève générale contre Morales marquée d’incidents violents

C’est une histoire de gros sous qui secoue le pays le plus pauvre d’Amérique du Sud. En organisant mardi une grève générale de vingt-quatre heures qui a paralysé une grande partie des activités dans leurs régions, cinq «prefectos» (gouverneurs régionaux élus) rebelles (sur les neuf que compte le pays) tentent par la pression de la rue de récupérer une manne financière confisquée par le gouvernement socialiste d’Evo Morales depuis octobre 2007. Le pouvoir avait décidé la création d’une pension annuelle à destination des personnes âgées de plus de 60 ans, baptisée «rente dignité», financée par l’impôt direct sur les hydrocarbures (IDH) qui tombait jusqu’ici automatiquement dans les caisses des régions. Le tollé est immense dans les territoires tenus par l’opposition qui dénoncent une mesure de rétorsion politique. «Cette année, nous avions prévu de recevoir 38 millions d’euros au titre de l’IDH, et nous n’allons finalement récupérer qu’entre 4 et 6 millions», assure un dirigeant de la région de Tarija. Elle concentre 80 % des réserves de gaz naturel boliviennes, qui sont les plus importantes d’Amérique latine après celles du Venezuela. Le 14 août, le président Morales a offert pour la première fois de dialoguer sur le dossier. Les gouverneurs rebelles ont refusé.

«Nous avons été trop tolérants avec le gouvernement et nous allons maintenant prendre toutes les mesures nécessaires», explique un dirigeant de la région de Santa Cruz.Preuve de l’extrême tension qui existe entre les deux camps, la grève de mardi a été émaillée de plusieurs incidents violents, essentiellement à Santa Cruz, fief des opposants à Morales et région la plus riche du pays qui concentre à elle seule un tiers du PIB. Deux policiers ont ainsi été battus et leur véhicule détruit par des membres de l’Union juvénile de Santa Cruz (UJC), régulièrement accusée par le gouvernement de perpétrer des actes de violence. Dans le quartier populaire de Santa Cruz, des partisans de Morales auraient fait subir le même sort à une équipe de journalistes d’une chaîne de télévision privée. Les sympathisants du pouvoir en place ont ensuite démenti toute implication dans l’agression.

«Actes irrationnels». Le gouvernement a souligné que la grève n’a été suivie que dans les capitales régionales et non dans les zones rurales, preuve selon lui de la pression exercée sur la population par les groupes autonomistes. «Nous considérons que le dialogue est ouvert et que la meilleure solution est de s’asseoir autour de la table et de négocier, au lieu de commettre des actes irrationnels», a commenté le porte-parole du gouvernement Ivan Canelas. De leur côté, les préfets ont en revanche appelé à bloquer les routes dès hier.

Réforme agraire. Le conflit entre pouvoir central et régions opposantes dépasse cependant la simple dispute financière. La politique menée par Morales depuis près de trois ans est totalement rejetée par la majorité des gouverneurs régionaux, tenants d’un libéralisme économique. Leur ire se focalise sur les nationalisations dans plusieurs secteurs stratégiques et une réforme agraire qui menace les grands propriétaires terriens, ainsi que sur la mise en place d’une nouvelle constitution politique attribuant des pouvoirs administratifs aux communautés indigènes du pays. 65 % environ de la population bolivienne se reconnaît comme indienne. Les trois principales ethnies sont les Aymaras, dont est issu Morales, les Quechuas, et les Guaranies.

Pour contrecarrer ces réformes, les gouverneurs ont choisi de promouvoir l’autonomie régionale afin d’obtenir une plus grande indépendance politique et économique. Quatre régions, représentant près de 50 % du PIB national, se sont ainsi autodéclarées autonomes ces quatre derniers mois, au cours d’un processus déclaré «sécessionniste et illégal» par La Paz. C’est pourtant cette même politique socialiste honnie par les préfets qui a conduit à une augmentation substantielle des budgets régionaux depuis l’arrivée au pouvoir d’Evo Morales en décembre 2005. Ainsi, grâce à la nationalisation des hydrocarbures, en 2006, le budget de la région Santa Cruz aurait, selon le ministre bolivien des finances, augmenté de 71 % entre 2005 et 2008. «Cela compense largement les 30 % que doit apporter la région pour la rente dignité», justifie Hector Arce.

Le 10 août, le président Morales était largement sorti vainqueur du referendum révocatoire avec plus de 67 % de vote positif. Mais, confirmant la fracture politique et régionale du pays, les principaux préfets opposants avaient également été ratifiés. Evo Morales a prévenu que sa large victoire lui donnait désormais toute la légitimité pour mener à bien ses réformes socialistes et indigénistes. Des réformes que cinq préfets régionaux sur neuf continuent de combattre farouchement, éloignant chaque jour un peu plus l’espoir d’une réconciliation nationale.

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