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11 Dec

Manifeste pour l’avenir

Publié par secretaire de section

Manifeste pour l’avenir

Votée il y a aujourd’hui soixante ans par les 58 États qui constituaient alors l’Assemblée générale des Nations unies, la Déclaration universelle des droits de l’homme demeure un manifeste pour l’avenir, « le premier que l’humanité organisée ait jamais adopté », selon les mots du juriste René Cassin, l’un de ses rédacteurs. Mais entre l’adoption et la réalisation, que le temps semble long ! Si l’on cédait au « pragmatisme », qui est sans doute le mot le plus employé dans la vulgate sarkozyste pour justifier tous les abandons des valeurs humanistes, on serait tenté de faire reproche aux pères de la Déclaration universelle d’avoir péché par excès d’utopie. Dès l’article premier - « Tous les hommes naissent libres et égaux en dignité et en droits (…), ils doivent agir les uns envers les autres dans un esprit de fraternité » - l’affirmation, inspirée de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, oeuvre de la Révolution française, est contredite par un ordre mondial qui génère tant d’injustices. Les millions de familles, principalement en Afrique, qui survivent avec l’équivalent de un dollar par jour, pour lesquelles la prévention sanitaire et les soins médicaux sont des droits inaccessibles, ne ressentent guère cet air de liberté qui enivre les happy fews de la finance.

Les détenus de Guantanamo et du pénitencier d’Abou Ghraib avaient-ils lu l’article 5 qui affirme que nul ne sera soumis à la torture ni à des peines ou traitements cruels inhumains ou dégradants ? Plus sûrement, ils avaient entendu le président George Bush justifier l’usage de la torture. La Déclaration de 1948 est bien dérangeante quand elle énonce le droit de chacun « de quitter tout pays, y compris le sien, et de revenir dans son pays ». Eh oui ! il y a soixante ans, l’ONU considérait comme une violation des droits de l’homme que l’on traque des immigrés pour les jeter dans un avion de l’expulsion. « Éloignement », dit-on maintenant dans la novlangue du ministère de l’Immigration et de l’Identité nationale !

Au vu de l’articles 23 - « Tout homme a droit au travail »… ou de l’article 25 - « Toute personne a droit à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé, son bien-être et ceux de sa famille : logement, soins médicaux, services sociaux, sécurité face au chômage, à la maladie, à la vieillesse… », dans la France de ce début de XXIe siècle où un sénateur en vue, du parti du président, peut imaginer une loi qui assurerait la sécurité aux boursicoteurs et aux spéculateurs, la Déclaration universelle des droits de l’homme est devenue un texte subversif insupportable pour la droite, comme le Front populaire l’est à François Fillon et comme 1968 aux yeux de Nicolas Sarkozy.

La Déclaration des droits de l’homme avait évidemment un caractère d’anticipation, elle est animée de cette utopie qui fait bouger l’histoire, mais elle était aussi un guide pour les gouvernants du monde. Écrite au lendemain de la victoire sur le nazisme, après le plus effroyable génocide de l’histoire contemporaine, elle exprimait un immense espoir en une humanisation possible de l’humanité, conjuguant l’avenir avec le progrès. En soixante ans, des avancées ont été accomplies dans bien des domaines. L’ONU compte près de deux cents États indépendants, alors qu’à l’époque le colonialisme, autre négation des droits de l’homme, sévissait encore du Maghreb à l’Afrique subsaharienne. Mais, aujourd’hui, l’idéologie dominante est tellement à la régression que mettre en oeuvre réellement la déclaration des droits de l’homme, c’est déjà changer le monde.

Pour l’heure, c’est pied à pied que le monde du travail peut inverser la tendance régressive, arrêter la machine à remonter le temps. Hier soir, on apprenait que le projet de loi autorisant le travail du dimanche, auquel tenaient tant Nicolas Sarkozy et Xavier Bertrand, est repoussé sine die. Le droit au repos et à la culture est peut-être sur le point d’être sauvé.

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